L’extrémisme est un phénomène historique, social et intellectuel, lié aux instincts humains et aux pratiques de la vie. Il trouve ses origines dans les pulsions de l’homme porté à recourir à la force et à la violence pour protéger ses intérêts ou défendre son existence, tout en avançant des justifications intellectuelles et morales à ses comportements extrémistes. Par conséquent, l’extrémisme n’a jamais été l’apanage de la religion, de la classe, de la société ou de la culture. Les débuts des manifestations violentes que l’humanité a connues remontent à l’incident de Caïn et Abel qui traduit un type de comportement humain inacceptable. Ainsi, les débuts du premier extrémisme ont été caractérisés par l’individualisme et des cas isolés un peu partout dans le monde, puis l’extrémisme est devenu un comportement collectif nourri par des instigateurs ethniques, politiques et religieux, avant d’empirer en s’associant avec les vicissitudes de la politique et les exigences du pouvoir, pour se muer en une lutte acharnée entre l’extrémisme et son opposé, dominant ou dominé soit-il.

Le radicalisme en général est un parti pris pour l’extrême droite ou l’extrême gauche concernant une position ou une question qui s’écarte du familier, de la logique et du rationnel. Le «Glossaire des Termes Terroristes», publié par la Coalition Islamique Militaire pour Combattre le Terrorisme (CIMCT), définit l’extrémisme comme étant le fait de: «Dépasser le seuil de modération et s’écarter du juste milieu, en une sorte d’outrance dogmatique qui est en soi une agression intellectuelle ou matérielle contre la création». Cette définition retrace les situations de l’extrémisme et ses manifestations observées dans des contextes historiques reposant principalement sur des orientations politiques, religieuses, ethniques et intellectuelles. Parmi ses plus importantes manifestations figurent notamment: 

L’Extrémisme religieux
L’extrémisme religieux est le fanatisme d’un individu ou d’un groupe pour une religion, une doctrine ou une secte. Les religions célestes ou positivistes de différentes sortes ont connu des formes d’intolérance et d’extrémisme, sans que cet extrémisme soit nécessairement justifié par des textes ou à des enseignements qu’elles prônaient mais découlait plutôt d’une compréhension particulière et d’un contexte historique ou politique qui utilisait le discours religieux pour atteindre des objectifs spécifiques. Voici des exemples d’extrémisme fondé sur la croyance religieuse:

•    Groupes juifs extrémistes
Les premiers groupes extrémistes basés sur le fondamentalisme religieux juif ont été formés par la secte des Zélotes fondée par Judas le Galiléen en 66 av. JC. Ses membres ont été appelés «Sicaires», en relation avec l’arme à épée courte (Sica), avec laquelle ils commettaient leurs meurtres et leurs assassinats. Ils ciblaient initialement les employés du gouvernement roumain et n’épargnaient pas les adeptes du judaïsme qui s’opposaient à leur orientation. Ce groupe se distinguait par ses méthodes innovantes de terrorisme et de meurtre tels l’empoisonnement de l’eau potable, les autodafés et la démolition des maisons. Il se peut que l’assassinat du Premier Ministre israélien Yitzhak Rabin en 1995 par l’extrémiste «Yigal Amir»,  soit l’une des manifestations contemporaines de l’idéologie et des méthodes de ce groupe, ressuscitées à l’époque actuelle  par les groupes religieux extrémistes et les gangs nationaux qui ont commis des massacres hideux contre le peuple palestinien désarmé durant des décennies.

•    Groupes chrétiens extrémistes:
Bien que le christianisme, comme toutes les religions divines, appelle à la paix, à l’amour et à la miséricorde, différents groupes ont utilisé les enseignements de Jésus-Christ, que la paix soit sur lui, à plusieurs reprises pour justifier l’usage de la violence! Les Romains ont utilisé la violence et l’intimidation pour imposer leurs croyances chrétiennes, et selon cette approche, il est possible de comprendre le phénomène de l’Inquisition, des croisades et des guerres de religion qui ont fait rage durant des décennies, causant des millions de victimes partout dans le monde dont des chrétiens eux-mêmes. Un exemple frappant est le ciblage de la secte chrétienne des Cathares et le massacre de plus de vingt mille de ses fidèles par la croisade des Albigeois, qui n’ont pas eu pitié même des catholiques de la ville, selon l’expression célèbre du légat du pape: «Tuez-les tous, le Seigneur reconnaitra les siens».

Les Chevaliers du Temple étaient, par ailleurs, le groupe extrémiste chrétien le plus célèbre du Moyen Âge, qui représentait une élite militaire pratiquant des actes criminels sous prétexte de «Protéger le christianisme», tandis que (l’Armée du Seigneur) Ougandaise fondée en 1986, pour établir un régime religieux chrétien basé sur la législation de la Bible, constitue un avatar contemporain de cette approche radicale.

•    Groupes islamiques radicaux:
L’extrémisme basé sur une interprétation religieuse islamique est apparu chez les (Kharijites), qui se basaient sur une perception idéologique erronée de l’Islam pour justifier leur extrémisme et taxer de mécréants tous leurs adversaires. De leur côté, les Qarmates ont dévié des enseignements de l’Islam et semé la terreur, le meurtre et le chaos au point de subtiliser la Pierre Noire de la Sainte Mosquée Al Haram à La Mecque. La secte des Mu’tazila a conduit  de son côté les gens à adopter l’idéologie Mutazilite comme un dogme de l’État par leur emprise sur le Calife Al-Ma`Mun, qui a imposé cette doctrine. De nombreux érudits d’élite qui rejetaient cette croyance ont péri, en particulier lors de la sédition sur la «création du Coran».

Les Assassins étaient une secte ismaélite clandestine d’extrémistes chiites, dont le terme «ASSASSIN» tire son étymologie. Le groupe était dirigé par «Hassan Ibn Al-Sabah» juchée dans sa forteresse d’Alamut en Perse, réputée inexpugnable. Il s’appuyait sur la terreur et les assassinats à l’aide d’attentats-suicides. Il sema la terreur dans le cœur des dirigeants et des princes qui s’opposaient à lui, après avoir assassiné Ministres, Califes et Sultans.

De nombreux mouvements à notre époque constituent une extension de ces sectes extrémistes tels Al-Qaïda et Daech parmi les sunnites qui suivent la trace des Kharijites, ou le Hezbollah et les Houthi parmi les chiites qui attisent le feu des luttes religieuses et des conflits sectaires.

•    Extrémisme bouddhiste
Le bouddhisme est considéré comme une religion pacifique qui opte pour la contemplation et la méditation, mais les exactions commises au Myanmar en ont montré une autre face en raison du nationalisme bouddhiste extrémiste qui a alimenté les discours de haine et la violence, et conduit à un génocide généralisé contre les musulmans Rohingyas.

L’Extrémisme politique
Les anciennes nations ont connu les effets de l’extrémisme conduisant à la violence et à l’agression sur l’autre. L’ère des pharaons a été marquée par un conflit sanglant entre les partisans des prêtres et leurs opposants. Athènes a renié le modèle grec de dialogue de civilisation lors d’incidents de violence fondée sur l’extrémisme intellectuel. Les Romains ont connu le crime politique dont le plus célèbre était l’assassinat de l’empereur Jules César suite au conflit avec l’aristocratie.

L’extrémisme politique s’est ancré tout au long de l’histoire, jusqu’à nos jours, avec certains partis ou courants politiques cherchant à imposer leurs opinions politiques unilatérales et à pratiquer l’exclusion et la marginalisation comme c’est le cas des partis extrémistes basés sur des approches radicales nationales, ethniques ou intellectuelles.

•    L’Extrémisme national
Les appels nationalistes fanatiques qui défendent les intérêts d’un peuple spécifique et pratiquent la xénophobie envers les étrangers, trouvent de l’écho parmi les mouvements et les partis politiques contemporains. Les tendances nationalistes extrémistes et populistes en Europe ont remporté des succès répétés et leur discours isolationniste menace désormais le modèle européen fondé sur la modernité, renforce la division sociale, suscite la violence et entrave le progrès et le développement de leurs sociétés.

Il est frappant que la droite extrémiste ait réussi en moins de dix ans à devenir un élément majeur de la scène politique européenne et américaine ou à tenir les rênes du pouvoir dans plusieurs pays. L’Inde est un modèle de la prévalence de l’extrémisme nationaliste hindou au cours des dernières années et son accession au pouvoir. La rhétorique de haine et de violence se répand de plus en plus, menant à la multiplication des attaques contre les musulmans indiens et à la haine généralisée pour les musulmans, les chrétiens, les sikhs et les bouddhistes.

•    L’Extrémisme totalitaire
Les régimes communistes, nazis et fascistes constituent un exemple clair de la radicalisation des systèmes intellectuels aigris par la structure sociale dominante. Sous prétexte du progrès humain, ils ont cherché à créer un nouvel être humain plus proche de la machine et adopté le principe de sacrifier au moins deux générations pour créer une génération supérieure. Ces régimes ont provoqué d’énormes catastrophes pour l’humanité en général et leurs peuples en particulier, qui ont enduré l’oppression et le nettoyage ethnique et culturel pendant de nombreuses années.

•    L’Extrémisme anarchiste
L’anarchisme est une sorte d’opposition absolue contre l’État, qui accorde le pouvoir à un groupe limité et soumet la majorité à ses propres choix et décisions, ce qui conduit à la restriction de la liberté humaine. Les anarchistes ont eu recours à la violence et à l’assassinat dans la seconde moitié du XIXe siècle, tel l’assassinat du tsar russe Alexandre II, en 1881, du Président américain McKinley, en 1901 et de bien d’autres.

En somme l’extrémisme, sous ses diverses formes et références, représente un fléau social qui répand la haine dans les sociétés humaines et sème la sédition et la division conduisant aux luttes intestines et aux guerres fratricides futiles et destructrices.