Flambée mondiale du terrorisme extrémiste en Occident, en particulier en Europe occidentale, en Amérique du Nord et en Océanie. Selon l’Indice Mondial du Terrorisme (GTI 2019), les crimes terroristes commis par ce courant ont augmenté de 320% au cours des cinq dernières années. Le rapport note que les attaques de l’extrême droite “n’ont pas été prises suffisamment au sérieux par les services de sécurité et de renseignement occidentaux, qui auraient dû prêter plus d’attention à cette menace”.

Les statistiques du National Forum for the Study of Terrorism and the Responses to it (START) aux États-Unis d’Amérique ont révélé que «les extrémistes de droite ont commis plus de 217 meurtres entre 1990 et 2018, et si nous excluons les événements du 11 Septembre 2001 aux États-Unis d’Amérique, les extrémistes de droite surpassent les dits extrémistes islamiques en terme d’activités terroristes commises aux États-Unis d’Amérique. Du 12 Septembre 2011 à 2014, la droite a commis 81 attentats terroristes ayant tué 131 personnes, tandis que les soi-disant extrémistes islamiques ont commis 28 attentats ayant tué 51 personnes».

Cette escalade du terrorisme est alimentée par les groupes haineux dont les États-Unis d’Amérique sont la principale base, et à partir desquels ils se propagent dans la plupart des pays occidentaux.

La colère des extrémistes blancs de droite a atteint le point de fièvre en 2018, après que le US Census Bureau a publié ses prévisions selon lesquelles les blancs ne seront pas majoritaires d’ici 2044, ce qui a contribué à pousser la haine à un niveau plus élevé, le nombre total de groupes haineux étant passé à 1 020 en 2018, soit avec une augmentation d’environ 7% par rapport à 2017, selon The Year in Hate: Rage Against Change. Le rapport annuel du Federal Bureau of Investigation (FBI) a révélé que les crimes de haine s’élevaient à 7 775 incidents criminels en 2017, contre 6 121 incidents en 2016.

Lors des élections législatives de mi-mandat de 2018, les extrémistes blancs ont commis trois attaques terroristes qui ont tué 15 personnes, et une quatrième attaque a échoué. La violence a été si choquante que les sondages d’opinion menés par la CNN ont conclu que les 3/4 des électeurs ont déclaré que la race était un facteur déterminant dans leur vote.

Parmi les nouveaux groupes extrémistes de droite les plus en vue aux États-Unis d’Amérique il y a le mouvement Rise Above (R.A.M.), dont les membres déclarent lutter contre un «monde moderne gâché par la culture des libéraux, des juifs, des musulmans et des immigrants non blancs». Le mouvement qui a annoncé sa création lors d’un rassemblement en soutien au Président américain “Donald Trump” près de Huntington Beach en Californie, opte pour la violence. Ses membres font la promotion de la doctrine néonazie sur divers réseaux sociaux. Certains d’entre eux ont un casier judiciaire pour usage de violence. D’autres ont participé à plusieurs marches telles que “A March Against the Law” à San Bernardino, Californie à la mi-Juin 2017, organisée par le groupe haineux “ACT for American” fondé par Brigitte Tudor, dite Brigitte Gabriel en 2007 et fort de 750 000 membres et plus de 1 000 succursales. C’est le plus grand groupe antimusulman aux États-Unis d’Amérique.

Le Front National (PATRIOT FRONT) a été fondé en Août 2017 en Virginie par l’extrémiste Thomas Rousseau qui n’avait que 18 ans à l’époque! Le Front a repris l’ancien site de Vanguard America appelé “Blood and Soil” (bloodandsoil.org), un slogan inspiré d’un poète nazi.

Les chiffres parlent 

Le groupe (Identity Evropa) a grandi très vite, le nombre de ses succursales est ainsi passé d’une succursale en 2016 à 15 succursales en 2017, puis à 38 en 2018. Il est à la pointe du recrutement de jeunes blancs et donne un caractère intellectuel à ses prétentions racistes. Le nombre de succursales d’Identity Dixie fondée en 2017 a atteint sept bureaux, un an après sa fondation. L’organisation (Division Atomwaffen) avec son nom allemand et ses pratiques nazies violentes, et dont les membres sont accusés d’être associés à cinq homicides depuis Mai 2017, est passée d’une branche en 2017 à 27 branches en 2018.

Internet sous charge

Les groupes haineux usent des médias sociaux pour diffuser leurs idées et recruter des partisans. Cesar Sayoc, 56 ans, qui a envoyé 14 bombes à tube aux détracteurs du Président Trump, a utilisé Internet pour diffuser des discours de haine contre les minorités musulmanes, les immigrants illégaux et les démocrates. 

Bien qu’il ait été arrêté cinq jours après avoir envoyé les colis piégés, et qu’il ait été inculpé de plusieurs accusations, dont la plus importante était de menacer d’anciens présidents et de posséder des explosifs illégaux, ces accusations n’incluaient pas la mauvaise utilisation des médias sociaux, et il a fallu cinq jours après son arrestation pour que Twitter ferme son compte.

Dans la plupart des cas, les sociétés technologiques ne prennent pas au sérieux les crimes de haine. La plupart des sites d’extrême droite, en particulier informels, sont placés sous les rubriques liées à la liberté d’opinion, et les sociétés attendent qu’il y ait de la violence physique contre les victimes pour que des mesures significatives soient prises, ce qui a été le cas après que Dylan Roof ait tué neuf noirs en 2015, à la suite des émeutes qui ont fait un mort et près de 20 autres blessés en Virginie en 2017 dans la plus grande manifestation raciste, convoquée par l’extrême droite via Facebook. Ce qui est dangereux, c’est que la majorité des groupes d’extrême droite ne sont plus de simples groupes, mais forment plutôt des réseaux organisés via les sites Web.

Avec la croissance rapide du nombre d’utilisateurs des médias sociaux, les groupes haineux d’extrême droite ont réussi à diffuser leur propagande à des millions d’utilisateurs, et bien que les sociétés technologiques leur aient fermé de nombreux comptes officiels, rien n’est fait pour les pages de groupes informels dirigés par des leaders dans ces groupes dont les comptes sont bloqués! Ainsi, Facebook a refusé d’interdire le site de Proud Boys qui cible les immigrants et les musulmans, et qui constitue un site de rassemblement pour ceux qui rejoindront plus tard les groupes extrémistes. Bien que le groupe ait mené une marche violente à Portland en Juin 2018, Facebook a déclaré que le groupe n’a pas violé ses normes et lui a gardé son site, ignorant les vidéos qui documentaient les agressions abusives du groupe.

En Août 2018, Jack Dorsey, PDG et co-fondateur de Twitter, a annoncé que sa société n’interdirait pas le compte d’Alex Jones, l’un des leaders de droite les plus en vue, quoique d’autres sociétés, telles que Facebook, YouTube et Apple, ont pris des mesures contre Jones. YouTube a rencontré des problèmes en 2019 après qu’une enquête de CNN a révélé que la société diffusait des publicités pour plus de 300 grandes marques sur les chaînes promouvant l’extrémisme.

Avaaz New York, qui lutte contre la haine sur les sites Internet dans 40 pays, a révélé que plus de 500 groupes suspects opèrent à travers la France, l’Allemagne, l’Italie, le Royaume-Uni, la Pologne et l’Espagne, et que les pages que Facebook a fermées ont reçu plus de 500 millions de vues.

La haine transfrontalière

Les États-Unis d’Amérique ont une très grande capacité d’influencer les pays du monde, en raison de leur influence politique, économique et intellectuelle. L’émergence d’un courant politique, culturel ou intellectuel et sa propagation dans ce pays produit une large résonance dans le monde entier, et donc l’impact des groupes haineux américains et l’extrême droite blanche s’est étendu à l’Europe et au Japon. Le populisme de droite alimenté par la haine anti-immigrant s’est répandu dans le monde entier. Les recherches effectuées par le journal britannique The Guardian avec plus de 30 politologues, ont montré qu’un Européen sur quatre vote pour des partis populistes.

Les extrémistes de droite américains aident leurs alliés du monde entier avec leurs réseaux internationaux. Ainsi, le parti d’extrême droite anti-immigration Lega, arrivé au pouvoir en Italie en mars 2018, dans le cadre de la coalition au pouvoir, est un allié du Congrès Mondial des Familles (WCF) dirigé par l’activiste de droite américain Brian Brown. Matteo Salvini, le Chef du Parti Lega, est devenu ministre de l’Intérieur et vice-premier ministre italien, et a ouvert les portes du pays grandes ouvertes aux extrémistes de droite américains tels que le leader des médias d’extrême droite, Steve Bannon. Salvini, le Premier ministre hongrois de droite Viktor Orban et le Président moldave Igor Dodun ont coopéré avec (WCF) et ont envoyé leurs discours pour être lus lors de la conférence annuelle du groupe qui réunit un grand nombre d’extrémistes d’extrême droite.

Le rapport officiel de l’Observatoire pour le Suivi des Crimes de Haine en Italie (OSCAD) a révélé que ces délits ont triplé entre 2017 et 2018, passant de 92 à 360 délits.

Au Japon, des membres du groupe extrémiste de droite appelé Zaitokukai sont descendus dans les rues de Tokyo en 2007 en criant: «Tuez les bons et les mauvais coréens». Ce groupe a formé un parti politique dont le chef Makoto Sakurai s’est rendu aux États-Unis d’Amérique en 2018 et a salué ses relations avec les nationalistes blancs américains. Le groupe Zaitokukai est très similaire des groupes européens de droite et ciblent les minorités ethniques avec des attaques violentes.

Les statistiques du rapport annuel sur la protection de la constitution en Allemagne, compilés par les services de renseignement qui surveillent les activités anticonstitutionnelles, montrent qu’il y avait 24 100 extrémistes de droite dans le pays en 2018, dont environ 12 700 personnes ciblées par la violence. La violence de droite a augmenté de 71% entre 2017 et 2018.

Concernant le nombre d’incidents haineux non signalés contre des Ukrainiens, des musulmans et des Africains subsahariens vivant en Pologne, le rapport d’Ipsos montre que sur 269 crimes, 19 seulement ont été signalés à la police!

Une étude publiée par le New York Times en référence à la base de données sur le terrorisme mondial publiée par l’Union Nationale pour l’Étude du Terrorisme à l’Université du Maryland Start a révélé qu’au moins un tiers des tueurs extrémistes blancs qui ont perpétré près de 350 attaques terroristes extrémistes en Europe, en Amérique du Nord et en Australie entre 2011 et 2017 ont été une source d’inspiration pour ceux qui ont commis des attaques ultérieures. Lors de l’incident de tirs de masse au Texas en Août 2019, l’auteur, Patrick Crusius (21 ans), a publié une déclaration quelques minutes avant de commettre son crime en disant qu’il s’était inspiré de l’attaque de deux mosquées à Christchurch, en Nouvelle-Zélande en Mars 2019, dont l’auteur Brenton Tarrant, 28 ans, a mentionné dans une déclaration qu’il a publiée sur Internet Anders Behring-Brevik, un extrémiste de droite qui a tué 77 personnes en Norvège le 22 Juillet 2011.

Fait intéressant, Behring a inspiré quatre autres extrémistes blancs, en plus de Tarrant, qui a également salué un Canadien qui a ouvert le feu dans une mosquée à Québec en 2017. Au moins quatre tueurs extrémistes blancs ont fait des déclarations en ligne faisant l’éloge d’Elliot Rodger (22 ans) qui a tué six personnes et blessé 14 autres près du campus de l’Université de Californie à Santa Barbara, avant de se suicider dans sa voiture le 23 Mai 2014.

Ce cercle d’extrémistes blancs de droite de la Norvège aux États-Unis, Nouvelle-Zélande et Canada indique qu’ils transcendent leurs affiliations nationales et se considèrent comme faisant partie d’un réseau mondial. “Ils ne se considèrent pas comme des Américains ou des Canadiens..., ils ont peut-être agi d’une manière qui semblait locale, mais la pensée a toujours été de construire un mouvement blanc”, a déclaré Heidi Beresh, Directrice du Renseignement au Southern Poverty Law Center, qui publie des rapports périodiques sur ces extrémistes et la haine aux États-Unis d’Amérique, ajoutant que “compte tenu de ces liens internationaux, il est important de revoir la nature de cette menace”. 

Wei Kay et Simon Lyndon, qui a écrit l’étude susmentionnée du New York Times, font référence au défi auquel sont confrontés les forces de l’ordre pour lutter contre les crimes de haine en Occident, à savoir la “myopie représentée par l’intérêt porté à l’extrémisme islamique comme étant le seul moteur du terrorisme international”.