​La liberté d’expression ne signifie pas de dire ce que l’on veut, quand et où on veut!  Personne n’a le droit de crier «feu!» ou «bombe !» dans un théâtre ou dans un avion. Une telle plaisanterie est passible d’amende ou d’incarcération. Des lois ont été promulguées pour contrôler la liberté d’expression et protéger les personnes en société ou sur les réseaux sociaux. Malgré leurs avantages, les médias sociaux ont des aspects négatifs connus, telle la diffusion de messages haineux et l’incitation à la violence. Ces inconvénients empirent si certains internautes n’assimilent pas le concept de liberté d’expression.

Liberté d’expression
La liberté d’opinion et d’expression est la pierre angulaire des droits de l’homme et des sociétés démocratiques, tels que les droits de rassemblements pacifiques, la participation aux affaires publiques. Les outils numériques, surtout les médias sociaux, ont renforcé la liberté des usagers de diffuser des informations et des idées, de recevoir et de publier, mais l’usage abusif de la liberté d’expression dans la diffusion de discours de haine a imposé l’application de contrôles législatifs pour réglementer la liberté d’expression faisant craindre toutefois un impact négatif sur les droits humains dans les sociétés modernes.

Les chartes internationales des droits de l’homme stipulent le droit de chaque individu à la liberté de pensée et d’expression, mais les pays adoptent des lois qui restreignent ou interdisent certains types d’expression sur les réseaux sociaux, tels que les discours qui attisent la haine et la violence.

Les défenseurs de la liberté d’expression réclament des espaces ouverts pour la libre circulation des idées pour les raisons suivantes:
  • La capacité d’exprimer des opinions rend le citoyen libre et indépendant.
  • Protéger la démocratie et préserver les principes du libéralisme.
  • La nécessité de parler librement de politique et de droit pour pouvoir voter, responsabiliser les décideurs au pouvoir et discuter des questions politiques et sociales épineuses.
Pour certains chercheurs, le discours de haine peut causer des problèmes complexes qui inhibent la liberté d’opinion, et insistent sur l’importance de restreindre ce discours sur les réseaux sociaux pour protéger les minorités contre l’intimidation, le mépris, les préjudices et la persécution. Mais avant toute restriction, il faudrait répondre à certaines questions importantes:
  • Qu’est-ce que le discours de haine et comment le circonscrire légalement?
  • Comment définir la zone grise entre liberté d’expression et discours de haine?
  • Qui a le pouvoir de restreindre la liberté d’expression?
  • Quel type de discours peut être restreint et comment agir sur les médias sociaux?
Pratiques et implications
Les méthodes utilisées par les groupes racistes pour diffuser des discours de haine sur Internet et les médias sociaux ne sont pas nouvelles. Les fascistes et les nazis au début du XXe siècle ont utilisé les médias de l’époque, comme la radio et la télévision pour diffuser leurs messages racistes, manipuler les sentiments des citoyens et s’attaquer aux immigrés, minorités et juifs.

1) Anonymat

Les médias sociaux permettent à chacun d’exprimer ses opinions, positions, orientations et d’avoir une voix audible. Ce qui est le propre de la liberté d’expression dans le système démocratique. L’internaute a deux options: utiliser sa véritable identité ou utiliser un pseudonyme. Les usagers anonymes tendent à exprimer des opinions impulsives contraires à la morale et aux lois, telles que les insultes, la calomnie, le mépris, la tromperie et la diffamation. Car ils n’assument aucune responsabilité morale ou légale, mais ceux qui ont une identité connue sont souvent responsables de leurs publications.

2) Diffuser de fausses nouvelles
La liberté d’expression absolue est une arme à double tranchant. Elle encourage les gens à exprimer leurs opinions sans crainte de réactions injustes, mais elle offre une opportunité à ceux qui veulent répandre la désinformation de semer la confusion et de troubler la paix sans en subir les conséquences. Dans la plupart des cas, aucune loi ne criminalise le partage de fausses informations sur les réseaux sociaux, ce qui entraîne une profusion d’informations fallacieuses.

Les fausses nouvelles peuvent entraîner des résultats désastreux dans la société, telles les déclarations alléguant la falsification des résultats des élections américaines de 2020 ayant provoqué des manifestations, des émeutes et des attaques contre le Congrès.

La plupart (des victimes) des fausses nouvelles sont celles qui ne peuvent pas vérifier l’authenticité des informations qu’elles lisent et prennent tout ce qui est publié comme vrai.

3) L’oppression numérique
Les commentaires sur les médias sociaux ciblent souvent les femmes et les minorités ethniques, sexuelles et religieuses. De nombreuses associations et organisations appellent les entreprises technologiques à prendre des mesures strictes contre la persécution numérique.

Toutes les plateformes ont adopté des règlements pour lutter contre la haine. Facebook, par exemple, considère le discours de haine comme une attaque directe contre les internautes sur la base des caractéristiques personnelles protégées, telles que la race, l’origine nationale et le genre. Twitter indique également son engagement à lutter contre les abus, la haine et le racisme. Toutes les entreprises ont des équipes qui travaillent en permanence pour examiner les posts et aider à faire respecter les règlements.

Haine et violence
L’ère des médias sociaux a permis donc de publier n’importe quel contenu sur le net sans penser aux conséquences. Les sites de réseaux sociaux sont devenus une arène majeure de haine sous couvert de liberté. Ainsi, de nombreux groupes racistes aryens diffusent leur propagande haineuse sur la suprématie blanche, déstabilisant la paix sociale, car leurs discours poussent des gens ordinaires à passer du virtuel aux actes de violence dans le monde réel.

Plusieurs événements ont montré récemment que la haine qui commence dans l’espace numérique peut conduire à des résultats catastrophiques dans la réalité, comme:
  • Wade Michael Page, le suprématiste blanc qui a entamé son activité sur des forums électroniques racistes aryens a tué six personnes dans un temple sikh du Wisconsin en 2012.
  • Dylann Storm Roof s’est auto-radicalisé sur les réseaux sociaux, avant de tuer neuf personnes dans une église noire de Caroline du Sud en 2015.
  • Robert Powersqui a tué 11 fidèles dans une synagogue de Pennsylvanie était actif sur le site de droite Gab, un site de type Twitter utilisé par les suprématistes blancs.
Tant que les opinions sur le cyberespace peuvent se transformer en violence réelle, la nécessité de légiférer des lois s’imposait pour faire face à l’intimidation, au harcèlement et aux menaces réelles de violence envers les individus et les institutions.

Défis de la légifération
La plupart des constitutions des pays protègent la liberté d’expression, également protégée dans les traités internationaux relatifs aux droits de l’homme. Malgré ces traités, de nombreux pays n’offrent pas une réelle protection de la liberté d’expression dans les lieux publics ou sur les sites Web et les plateformes de communication. Il devient donc nécessaire de comprendre la différence entre la liberté d’expression légitime garantie par la loi et le discours de haine.

L’un des défis de la légifération du discours de haine sur les réseaux sociaux est d’être utilisé comme prétexte par les régimes répressifs pour restreindre davantage les droits de leurs citoyens, car la définition de la haine varie d’un pays à l’autre et d’une culture à l’autre. 

La définition ce terme n’est jamais facile. Il n’en existe aucune définition convenue internationalement, du fait qu’elle est lié à nombre de questions juridiques telles que la liberté d’opinion, la discrimination, ou l’incitation à la discrimination et à la haine ou l’incitation à l’hostilité et à la violence, qui doivent être prises en compte lors de l’élaboration d’une définition objective du discours de haine.

Les affaires de liberté d’expression et de discours de haine sont difficiles à résoudre devant les tribunaux. Les poursuites contre les entreprises de médias sociaux par des individus ou des organisations alléguant des violations de leur liberté d’expression, ou la haine et l’intimidation, sont souvent rejetées. La principale raison de la difficulté de statuer sur ces affaires est que les médias sociaux appartiennent à des entreprises privées, ce qui les rend non soumises à la protection de la liberté d’expression stipulée dans la loi.

Aussi, ceux qui publient sur les médias sociaux n’ont-ils pas le même droit à la liberté d’expression. Les entreprises propriétaires des plateformes ont le droit de règlementer les comportements selon leurs lois internes et interdire n’importe qui, comme l’a fait Twitter avec le président Donald Trump et d’autres.

En conclusion, il s’avère que la légifération de la lutte contre le discours de haine dans l’espace numérique est l’un des principaux défis auxquels sont confrontés les pays. Il devient donc nécessaire de suivre étroitement les nouvelles initiatives législatives pour rétablir l’équilibre entre la protection de la liberté d’expression et l’interdiction des discours de haine.

Pour mener à bien cette surveillance, les entreprises de médias sociaux doivent être franches sur le contenu qu’elles bloquent et mettre leurs données à la disposition des chercheurs et du grand public pour examen.