L'extrémisme s'est propagé au cours des dernières décennies dans le monde entier, mais il a été plus important et plus dangereux dans certains pays que dans autres, dont les Philippines. Le gouvernement philippin s'est mobilisé pour rechercher les moyens de lutter contre ce phénomène troublant. Bien qu'il ait adopté la force militaire et sécuritaire comme solution, il n'a pas obtenu de résultats significatifs sur le terrain. Les actes terroristes se sont multipliés, causant de grandes pertes matérielles et humaines, surtout dans le Sud du pays. Par conséquent, il était nécessaire de penser à adopter une nouvelle approche pour affronter et éliminer ce problème, de sorte que l'État a opté pour un partenariat stratégique avec le Front Moro Islamique de Libération (FMIL), après que des éléments des mouvements de libération Bangsamoro se sont séparés de leurs organisations mères et ont adopté une approche optant pour l'extrémisme violent.

Confiance réciproque
L'administration de l'ancien Président philippin Benigno Simeon Aquino III était convaincue que le FMIL pouvait être un partenaire stratégique dans la lutte contre l'extrémisme et le terrorisme dans la région. Malgré la complexité de traiter ces questions, le gouvernement philippin a insisté pour aller de l'avant avec ses plans d'éradication de l'extrémisme et du terrorisme, incitant les administrations successives, y compris l'administration de l'ancien Président philippin Rodrigo Duterte, à coopérer avec les dirigeants du FMIL.

Ce changement de politique du gouvernement philippin a été approuvé par le Front Islamique, qui a fait de la mise en œuvre de l'approche de partenariat stratégique pour éliminer le phénomène de l'extrémisme et le terrorisme une priorité. La confiance et la compréhension entre les deux parties ont ouvert la voie à l'échange d'informations et à la réalisation d'opérations importantes et de grande envergure contre les réseaux terroristes, qui ont conduit à la mort et l'arrestation de nombreux membres et dirigeants de groupes terroristes.

Causes de l'extrémisme
Les racines de l'extrémisme aux Philippines remontent à la politique d'assimilation et d'intégration adoptée par le gouvernement envers la question de Bangsamoro. Cette politique a conduit à un conflit violent et prolongé entre les mouvements de libération de «Bangsamoro» d'une part et le gouvernement philippin d'autre part. De nombreux citoyens de Bangsamoro ont rejeté la politique d'assimilation du gouvernement, exprimant leur désir de faire de leur région une province ou un État fédéré comme les États-Unis d'Amérique.

Le gouvernement a utilisé la force militaire pour intégrer le peuple de Bangsamoro, et en particulier les mouvements de libération, ce qui a suscité un vif mécontentement populaire. Ce désagrément s'est transformé en protestations contre le gouvernement s'opposant à cette fusion. Ces protestations ont duré longtemps, mais elles ont été inutiles. Le gouvernement a poursuivi sa politique. La crise s'est exacerbée par le fait que le gouvernement était déterminé à adopter une politique d'intégration dans une société dominée par les chrétiens politiquement, socialement, économiquement et culturellement, étant la grande majorité de la population. Les choses ont empiré lorsque le gouvernement a tenté d'imposer l'intégration culturelle, religieuse et linguistique des habitants de Bangsamoro dans la culture chrétienne dominante, et usé des institutions publiques telles que: Les écoles, les universités et les médias, pour mettre en œuvre cette politique souvent peu pacifique. Cette politique a généré de nombreuses réactions de ressentiment qui se sont transformées en violence, en particulier parmi la jeune génération de Bangsamoro, le groupe Abu Sayyaf et le groupe Maute affilié à l'organisation terroriste Daech.

Répercussions multiples
Les opérations de fusion forcée ont déçu les habitants de la province de Bangsamoro car elles sont menées sans leur consentement et mettent fin à leurs aspirations à l'autonomie, notamment en se rendant compte qu'ils étaient exclus des postes vitaux et des cercles de prise de décision. Le sentiment d'injustice, de discrimination, d'oppression et de marginalisation a pris de l'ampleur. Or ces phénomènes qui attisent la colère peuvent conduire à l'extrémisme violent.

Ce processus a eu des effets considérables sur tous les aspects de la vie dans cette région. Politiquement, il a omis l'identité politique d'un peuple qui veut faire valoir son droit à la liberté et à l'autodétermination, ce qui a déclenché des conflits entre le gouvernement régional et les habitants, se traduisant par l'émergence de mouvements de libération de Bangsamoro, tels que: le Front Moro de libération nationale et le Front Moro islamique de libération.

Sur fond de la colère qui régnait parmi les habitants de la région, des groupes extrémistes ont émergé, tels que: Le groupe Abu Sayyaf et le groupe Maute, qui ont commis des actes de violence et semé le chaos, notamment à l'aide d'attaques contre les installations et les fonctionnaires du gouvernement, d'enlèvement de soldats contre rançon en échange de leur libération, ou leur décapitation en cas de non-paiement. Il était naturel que le gouvernement des Philippines ne puisse pas faire clairement la distinction entre les groupes extrémistes et terroristes et les mouvements de libération de Bangsamoro qui luttaient pour leurs droits et libertés légitimes, ce qui a contribué à faire détériorer la situation sécuritaire dans le sud du pays.

Suite au rejet de la politique d'assimilation du gouvernement et l'octroi de l'autonomie à la région de Bangsamoro dans la province musulmane de Mindanao, la stabilité est revenue dans la région. De bons efforts pour parvenir au développement durable semblent s'installer, ce qui se reflète positivement sur la vie des citoyens. Le 7 juin 2020, Hussain Uruk, vice-président de la Fondation Humanitaire et de secours a déclaré que l'harmonie entre les musulmans, les chrétiens et les autres minorités de la région est devenue un exemple pour d'autres régions du monde.

Cette nouvelle politique a entraîné un ressentiment intense envers les groupes extrémistes, non seulement dans le sud des Philippines, mais dans tout le pays. Cette évolution a été une source d'optimisme dans la réalisation d'une vie sûre et stable, non seulement pour les Philippins, mais aussi pour l'Association des nations de l'Asie du Sud-Est et au-delà.

Rejet populaire
Les groupes extrémistes de Bangsamoro n'étaient pas populaires auprès des habitants de la région qui n'étaient pas convaincus de la logique de leur lutte, de l'absence d'un objectif politique clair, pour lequel ils se battent ou d'une vision claire de la nature de la société qu'ils recherchent. En outre, les groupes extrémistes, tels que ceux d'Abu Sayyaf et Maute commettaient sans cesse des crimes sanglants contre les civils innocents, tels que des enlèvements, des meurtres et des attentats à la bombe, en particulier des opérations dans des zones densément peuplées, en plus d'actions politiques, sociales et des grèves économiques, forçant la population à l'évacuation de certaines zones, sous prétexte qu'elles leur appartenaient et qu'elles étaient sous leur influence, ce qui a fait d'eux des parias auprès des citoyens en général.

Le siège de la ville de Marawi en 2017 et les affrontements qui ont éclaté entre les forces de sécurité gouvernementales et les militants du groupe Abu Sayyaf et du groupe Maute, ayant duré près de cinq mois, ont occasionné des destructions massives et de lourdes pertes. Environ un millier de personnes ont été tuées et plus de 300 000 ont été chassées de leurs maisons, et les installations vitales ont été gravement endommagés. Le gouvernement philippin a estimé que la reconstruction de la ville coûtera environ 50 milliards de pesos (environ 899 millions de dollars), ce qui a intensifié le mécontentement populaire à l'égard des groupes terroristes et de l'approche violente qu'ils adoptaient pour atteindre leurs objectifs. Les observateurs soulignent que le succès de l'État à absorber les griefs du peuple de Bangsamoro, à lui accorder un pouvoir raisonnable et à reconnaître ses groupes défavorisés, a conduit à la loyauté des citoyens envers l'État et a aidé à contrer les groupes extrémistes et violents.

Renoncer à l'extrémisme
La mise en place du gouvernement autonome dirigé par le Front Moro islamique de libération dans la région musulmane de Mindanao en 2019 a permis au Front d'administrer le gouvernement intérimaire, sous la dénomination «Autorité de Transition de Bangsamoro», tout en entravant les groupes extrémistes exclus des initiatives pacifiques, ce qui les affaiblis et réduit en grande partie leur influence.

Le Front Moro islamique de Libération a commencé sa coopération avec le gouvernement des Philippines sous l'administration de l'ancien Président philippin Benigno Aquino III. Il a apporté une aide précieuse à la neutralisation des rebelles liés aux réseaux terroristes mondiaux et au démantèlement de leurs groupes. Ainsi, le célèbre fabricant de bombes, Abdul Basit Othman, chef et cerveau de nombreuses opérations extrémistes ayant visé le gouvernement philippin et ses alliés, a été neutralisé. Il paraît qu'il était responsable de l'attentat contre le général Santos le 21 avril 2002 dans lequel 15 personnes ont été tuées et 55 autres blessées. Il dirigeait un groupe d'opérations spéciales lié à Abu Sayyaf et Jamaat Islami, la branche Sud-est Asiatique d'organisations terroristes mondiales comme Al-Qaïda et Daech.

L'autorité de transition de Bangsamoro a réalisé des progrès tangibles dans une région déchirée par la guerre, la violence et le chaos, et a fait barrière contre les extrémistes et les autres groupes armés. Les opérations militaires du gouvernement Philippin et du FMIL, ainsi que la propagation de l'épidémie du (Covid-19), ont provoqué de fortes pressions sur les extrémistes et aidé à les disperser dans différentes parties du pays, réduisant considérablement leur nombre.

Grâce à l'étroite collaboration entre les deux parties, les opérations conjointes des Forces armées des Philippines et des Forces armées islamiques de Bangsamoro, l'aile militaire du FMIL ont permis de démanteler nombre de réseaux terroristes et de neutraliser des dizaines d'extrémistes et de combattants terroristes. Le gouvernement philippin a bénéficié des efforts du Front pour démanteler les réseaux terroristes internationaux dans la région, tels que: Al-Qaïda, l'organisation Daech en Irak et en Syrie et d'autres groupes.

Conclusion
Cet article souligne l'importance du partenariat stratégique entre le gouvernement des Philippines et le Front Moro islamique de libération, et son impact sur la confrontation des groupes extrémistes. Si ce partenariat prouve son utilité pour démanteler les réseaux terroristes et neutraliser nombre de leurs éléments, en plus de traiter d'importants dossiers de sécurité, cela encourage sans aucun doute l'expansion de ces partenariats pour faire face à ces phénomènes extrémistes malveillants. Ce modèle peut servir de cadre aux efforts de lutte contre l'extrémisme et le terrorisme aux Philippines, dans les pays de l'ASEAN et ailleurs dans le monde.