Nous sommes confrontés dans nos sociétés actuelles à une escalade vertigineuse de l’extrémisme dans le monde réel et virtuel, que ce soit au niveau du discours ou des pratiques. La pandémie actuelle du Coronavirus (Covid-19) et la dégradation de la politique mondiale ont aggravé les inégalités structurelles de nos sociétés, ce qui a conduit à davantage de division et de vulnérabilité. Le ciblage et le recrutement transfrontaliers des individus constituent désormais des pratiques banales. Étant un processus croissant qui se développe au fil du temps, l’extrémisme nécessite divers moyens et outils pour le prévenir et le combattre.

Les acteurs politiques influents, officiels et non officiels, diffusent des discours dangereux aux niveaux local et régional, ce qui complique considérablement la tâche de ceux qui luttent contre le fondamentalisme et l’Extrémisme Violent (EV), en particulier ceux qui travaillent en dehors des environnements institutionnels, où sont prises les mesures traditionnelles pour lutter contre l’EV.

De nombreuses études antérieures ont traité de l’impact des organisations internationales, des États et des ONG dans la prévention des conflits, grâce à des formules de consensus entre eux pour une meilleure coopération, en dépit des contradictions liées à la nature de l’action institutionnelle, à la manière de comprendre les problèmes et aux conflits d’agendas. En effet, nous ne disposons toujours pas d’outils systématiques et consensuels pour lutter contre le fondamentalisme et l’EV. Souvent, les programmes ont tendance à adopter les points de vue occidentaux et focalisent sur les programmes d’action sans procéder à une évaluation claire et comparative de leurs performances et de leur taux de succès.

Impact de l’éducation
L’éducation a un effet constructif et préventif important dans la lutte contre l’EV par le biais des programmes officiels dans les écoles, des programmes de réhabilitation dans les prisons ou des programmes éducatifs destinés aux organes privés et non publics. Elle englobe également les pédagogies d’enseignement et l’éducation inclusive visant à préparer les sociétés à combattre le fondamentalisme et l’EV et à renforcer la culture médiatique. Ces méthodes ont été adoptées au Royaume-Uni, au Canada, en Allemagne et aux Pays-Bas.

Les sociétés déploient de gros efforts pour lutter contre l’EV, toutefois, certaines mesures ont été critiquées pour avoir ciblé les communautés minoritaires ou à cause de la perte de confiance lors de la mise en vigueur des mesures de contrôle communautaire.

Le Centre de Recherche Post-Conflit (CRPC), établi en 2011, s’est intéressé à la diffusion d’une culture de paix et de rejet de la violence, en développant les approches modernes pour enseigner les idées de paix, les recherches post-conflit, les Droits de l’homme et la justice sociale. Il a œuvré pour les mettre en œuvre, afin de renforcer la résilience des communautés locales, en particulier dans les Balkans occidentaux, où les sociétés traversent une phase de transition après un conflit acharné. De nombreux programmes et initiatives du CRPC ciblent la jeunesse, afin de contrer la polarisation actuelle et prévenir de futures guerres, les conditions post-conflit imposant une réalité de fragmentation et de polarisation aiguës.

L’action du CRPC concorde avec les objectifs de promotion de sociétés saines et leur sensibilisation sur les dangers de division et d’extrémisme alimentés par diverses parties actives, à l’intérieur et à l’extérieur des sociétés. L’impact du Centre est grandement apprécié. Il travaille avec ses partenaires depuis près d’une décennie et a été récompensé pour son excellence aux niveaux national, régional et international.

Initiatives créatives
Parmi les meilleures initiatives du CRPC pour lutter contre l’EV, figurent trois programmes usant des multimédias créatifs pour répandre une culture de paix, prévenir la pensée extrémiste et former aux compétences pratiques qui préparent les nouvelles générations à faire face à l’EV. Ces programmes démontrent la faisabilité d’utiliser les multimédias créatifs pour fournir une plate-forme d’échange d’idées et de débats et pour influencer les nouvelles générations et les préparer à lutter contre l’EV.

Le CRPC a réussi à développer un programme de lutte contre l’EV et à le mettre en œuvre en collaboration avec l’Organisation Internationale pour les Migrations (OIM). Il s’est également distingué dans la formation des jeunes, ce qui a abouti à des dizaines de campagnes sur les réseaux sociaux visant à promouvoir le discours contre l’EV. Ainsi, pendant deux mois, les participants à un programme de mentorat ont non seulement travaillé sur la formation, mais ont également développé un contenu compétitif pour appliquer les connaissances acquises grâce aux programmes visant toutes les communautés en Bosnie-Herzégovine. Ces campagnes sur les médias sociaux ayant impacté tout le pays prêtaient attention aux conditions spécifiques des communautés locales et donnaient la priorité aux groupes vulnérables, tels que les jeunes, les anciens combattants et les femmes. Agissant à travers des hashtags spécifiques, ces programmes ont été très partagés sur divers sites sociaux, tels que Facebook, Instagram et les blogs et ont bénéficié d’un grand suivi populaire.

L’une des campagnes a promu des histoires positives de réussite de jeunes, malgré les conditions financières difficiles, le chômage et l’exclusion et donné la parole à ceux qui cherchent un avenir meilleur. L’un des résultats les plus importants du projet a été d’améliorer les programmes de discours contre l’EV via les médias sociaux et de sélectionner des participants de différentes orientations, tout en tenant compte de la race, religion, sexe, géographie, répartition démographique et autres distinctions pour montrer l’image de la société dans son ensemble face à l’EV.

Le Centre a lancé un programme régional ciblant l’Albanie, Bosnie-Herzégovine, Monténégro, Macédoine du Nord et Kosovo. Dix dirigeants de la société civile et d’ONG suivaient une formation dans plusieurs domaines dans le cadre de la lutte contre l’EV, dans le but de lancer des campagnes sur les réseaux sociaux pour des sociétés plus solidaires, pacifiques et durables. Les organisations régionales cherchent à fournir une plate-forme pour l’échange d’informations et davantage de coopération et de sensibilisation. Chaque campagne produit du matériel visuel comprenant des images, des graphiques, des vidéos ou des designs expressifs à partager sur différentes plates-formes. L’un des objectifs de ce programme est d’assurer la coopération nationale pour lutter contre le fondamentalisme et l’EV en fonction des ressources disponibles, sachant que ces mesures traversent inéluctablement les frontières, vu que nous vivons dans un monde globalisé.

Le troisième programme intitulé «Gitans Marginalisés», ne vise pas principalement à lutter contre l’extrémisme mais rapporte des récits qui s’opposent à la discrimination généralisée, à laquelle sont confrontés les Gitans dans les Balkans. Le projet a produit un livre qui documente des témoignages personnels et des images sur les Gitans, comparés aux schémas communs et aux préjugés et stéréotypes sur cette minorité. Le projet affiche la diversité et la richesse des expériences gitanes et évoque les succès de lutte contre les stéréotypes véhiculés.

L’expérience du CRPC montre que le ciblage des stéréotypes à l’aide de techniques de narration visuelle et orale peut avoir des résultats positifs, affecter directement les individus et encourager au changement. À l’avenir, des programmes similaires pourraient promouvoir la sensibilisation individuelle et collective pour ceux qui ont renié l’extrémisme.

En conclusion, le plan d’action du CRPC ne vise pas uniquement la prévention, mais cible plutôt l’agenda de lutte contre l’EV dans son intégralité, et apporte une contribution significative à ses différentes étapes, pour assurer une plus grande participation, sans contredire l’objectif des sociétés inclusives. À long terme, les approches multimédias créatives recourant aux récits de réfutation peuvent être utilisées comme moyen de prévention et source d’élaboration de futurs projets.